Dans certaines forêts, les feuilles ne tombent jamais tout à fait.
Elles restent là, suspendues dans l’air… comme les vieilles légendes celtes de Bretagne.
Pas mortes. Pas vivantes.
Juste… entre deux mondes.
Et si on s’y promenait un peu ensemble ?
La Bretagne : une terre posée entre les mondes
La Bretagne ne parle pas.
Elle souffle. Elle bruisse. Elle grince doucement sous les pas.
C’est une terre qui respire le granit, l’iode et les enchantements.
Les mythes bretons, on ne les lit pas dans un livre.
On les sent dans les doigts quand on caresse un menhir.
Ils se glissent dans les cheveux, comme une pluie fine.
Ils passent dans les cœurs — quand le vent tourne, à la tombée du jour.
C’est ça, le folklore celtique breton :
une mémoire vivante, transmise dans les replis de la lande.
Pas une histoire bien rangée. Un brouillard qui parle.
Brocéliande : forêt ou passage secret ?
Tiens, Brocéliande.
On croit souvent que c’est juste un joli mot pour désigner Paimpont.
Mais en vérité ?
Brocéliande n’est pas un lieu. C’est un état.
Celui où le réel se laisse traverser par l’étrange.
On y cherche Merlin. On y trouve des reflets.
Des pierres qui brillent sans lumière.
Des fontaines qui ne font pas que désaltérer… mais qui interrogent.
Souhaitez quelque chose en silence, trempez vos lèvres… et attendez.
Un frisson, parfois, suffit à exaucer.
Et ces arbres…
Tordus comme des anciens qui méditent debout.
Certains disent qu’ils savent tout.
D’autres, qu’ils gardent les secrets des druides disparus.
Mais si vous vous approchez vraiment, vous n’entendrez pas de voix.
Juste… une présence.
Les Korrigans : petits, mais pas si mignons
Alors, eux…
Les Korrigans.
On croit que ce sont des lutins joyeux, rieurs, un peu moqueurs.
Mais non. Pas tout à fait.
Ils ont les yeux rouges comme les braises sous la cendre.
Ils dansent en rond, oui, mais pas pour vous amuser.
Ils dansent pour veiller. Pour troubler. Pour punir, parfois.
On raconte qu’ils sortent la nuit, juste avant l’aube.
Juste quand tout semble paisible.
Ils murmurent aux oreilles de ceux qui dorment.
Ils échangent des bébés contre des pierres.
Ou des pierres contre des vérités.
Un conseil ?
Ne touchez jamais à un cercle de champignons.
C’est leur territoire. Invisible… mais bien gardé.
Morgane : sirène, fée ou stratège ?
Morgane la Fée.
Son nom claque comme une vague contre les rochers.
On la croit méchante, cruelle, sorcière.
Mais attendez…
C’est plus compliqué.
Elle est née de la mer et de l’ambition.
Fille du chaos, sœur des marées.
Elle soigne. Elle piège. Elle devine.
Elle aime trop fort. Elle se venge parfois.
Et elle attend, quelque part — dans l’île d’Avalon ou sous la brume.
On l’entend parfois dans les tempêtes, lorsqu’un bateau hésite à rentrer au port.
Elle n’est ni bonne ni mauvaise.
Elle est puissante. Magnétique. Incompréhensible.
Comme un rêve qu’on fait deux fois.
Les âmes dans les arbres
Les anciens Celtes croyaient que chaque arbre avait une mémoire.
Un chêne, par exemple ?
Il pouvait contenir l’âme d’un chef.
Un noisetier ? Un oracle.
Et quand le vent souffle fort, que les branches claquent…
Certains y entendent des messages d’un autre âge.
Pas des mots. Des intentions.
Encore aujourd’hui, en Bretagne, certains arbres sont noués de rubans.
Des morceaux de vœux, des petits bouts d’attente.
On y confie ce qu’on ne peut pas dire aux humains.
Et parfois, au printemps… la réponse pousse.
La mer, toujours elle
La mer en Bretagne n’est jamais silencieuse.
Elle chuchote. Elle grogne. Elle attire.
Le mythe de la ville d’Ys en est un exemple vertigineux.
Une cité brillante, riche, bâtie sous le niveau de la mer.
Protégée par une digue.
Et trahie… par la main d’une femme et le cœur d’un homme.
Dahut, la fille du roi, ouvre la porte.
L’eau entre. Tout s’effondre.
Mais certains disent que la ville n’a pas disparu.
Elle dort, juste. Sous les vagues.
Certains pêcheurs jurent avoir vu des clochers sous la surface, un soir sans lune.
D’autres… préfèrent ne rien dire.
Le dragon de l’île de Sein
Parlons d’une île. Minuscule. Froide. Battue par les vents.
L’île de Sein.
Autrefois, dit-on, elle était gardée par neuf prêtresses.
Des femmes puissantes, capables de calmer les tempêtes d’un mot.
Elles voyaient l’avenir. Elles dansaient avec les morts.
Elles parlaient aux vents.
Mais un jour, un dragon s’y serait installé.
Pas un dragon qui crache du feu.
Un autre.
Un qui enroule les esprits. Qui vous fait douter de ce que vous voyez.
Il dort toujours là, paraît-il.
Et parfois, quand un visiteur reste trop longtemps…
Il oublie pourquoi il est venu.
La mort, pas tout à fait mortelle
Dans le monde celte breton, la mort n’est qu’un passage.
Un couloir avec des bruits étranges.
La dame blanche, la noce des morts, les chants d’Ankou…
Tout cela n’est pas là pour faire peur.
Mais pour rappeler que rien ne s’arrête vraiment.
L’Ankou, par exemple.
Vous connaissez ?
Un homme très grand, très maigre, un peu voûté.
Toujours avec sa charrette grinçante.
Il ne vous veut pas de mal.
Il vient quand c’est l’heure. C’est tout.
Il vous regarde, il attend, et parfois… il repart.
Ce n’est pas la fin.
C’est juste la suite.
Et nous, là-dedans ?
On pourrait croire que ces légendes celtes de Bretagne sont loin de nous.
Des vieilles histoires, poussiéreuses, pour les veillées.
Mais non.
Elles s’infiltrent partout.
Dans les silences, dans les rêves.
Dans les objets qu’on porte sans raison (tiens, cette pierre dans la poche…).
Dans les regards qui s’évitent sous un dolmen.
Elles nous murmurent que le monde n’est pas tout à fait ce qu’on croit.
Qu’il y a, sous chaque caillou, une vérité bancale.
Une faille. Une brèche. Une chanson.
Et si on y croyait, juste un peu ?
Il ne s’agit pas de tout prendre au mot.
Pas besoin d’aller chercher des fées dans les fourrés ou de danser nu au clair de lune (quoique…).
Mais simplement…
Écouter. Regarder autrement.
Laisser une place pour le doute, pour l’étrange.
Parce que c’est peut-être là que tout commence.
Dans l’idée que, parfois, un menhir écoute.
Qu’un cercle de pierre protège.
Que le vent, sur les falaises, porte autre chose que de l’air.
On n’est pas seuls.
On ne l’a jamais été.

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